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MON VICE D'ADO
Oui, il faut que j'accouche de ce terrible secret. Je n'en ai jamais touché mot à quiconque. Je vous le livre à vous, parce que je suis vieux, parce que c'est vous, parce qu'il y a prescription, il est resté enfoui dans un recoin de ma mémoire, mais v'là-t'y pas qu'il vient de resurgir, inopinément.
Ado, j'étais timide. C'est peu dire, et ça m'a duré jusqu'à trente-cinq ans. Mais terriblement coincé ! Je me trouvais quelconque, pas sûr de moi du tout. Heureusement, ça a bien changé et je vous dirai une autre fois comment et pourquoi. Livrer un vice à la pâture publique n'est pas anodin. Mais je le fais dans un aveu de sincérité, avec toujours une petite tache de honte dans un coin, encore maintenant.
Un vice, ça ne naît pas comme ça, innocemment parti
de rien. Il faut un déclic, une genèse. La genèse
de mon vice, là voilà :
J'avais treize ans, j'allais au lycée à Paris de ma banlieue
par le train Sartrouville Saint-Lazare le matin, Saint-Lazare Sartrouville
le midi, Sartrouville Saint-Lazare pour deux heures, Saint-Lazare Sartrouville
après le dernier cours au "Grand Condorcet". Immuable
routine commencée dès l'âge de six ans.
Donc, cette après-midi ensoleillée vers Paris, je pris le
train comme de coutume. Les places assises étaient rares. C'était
dans une voiture à étages. Je trouvai une place au milieu
d'une rangée. Une jeune et belle femme d'un trentaine d'années
au plus était assise en face de moi, jambes croisées. Et
durant le trajet, je sentis bien sa jambe insistante contre la mienne.
Emoi, je peux vous dire ! Grand émoi qui provoqua une belle rougeur
sur mes joues. Elle me regardait furtivement, son léger sourire
coquin m'embourbait de plus belle. Elle y prenait plaisir, assurément.
Ça dura jusqu'à l'arrivée. Je la guettai marchant
sur le quai un peu en amont puis elle disparut après le portillon.
Moi, j'étais tellement exalté que j'avais envie de raconter
ma belle aventure à tous les lycéens de ma classe. Je n'en
fis rien cependant. Voilà la fameuse genèse.
Quelques jours plus tard, rebelotte avec une
femme plus âgée, belle et ronde. C'était un appel,
une vocation ! Me faire jamber, genouiller, piétiner par des femmes
mûres. Ainsi se créa mon vice, tout seul, tout bête,
tout petit. Mais il grandit vite et je n'eus de cesse pour renouveler
cet échange secret et discret.
Je pouvais alors faire tout le train pour trouver un noble objet de ma
convoitise. J'explorais le train entier. J'en ressentais la honte, car
déjà, je me rendais bien compte que c'était un vice,
donc mal vu, mal venu. C'était pourtant merveilleux pour un adolescent
comme moi.
Ça m'a duré quatre ou cinq ans. Plus fort que moi, normal
pour un vice, et tellement enthousiasmant...
Ce contact furtif ne déboucha jamais sur un dialogue ou un échange.
C'était juste pour la durée du trajet.
Une fois, j'osai aborder une jeune fille un peu gauche après plusieurs
trajets-contacts et nous nous prîmes même la main. Mais la
relation s'est vite évanouie, je crois qu'elle était trop
jeune pour moi, elle avait mon âge, pensez !
Soyons précis dans la description de la pratique : je m'asseyais jambes bien ouvertes en face d'une dame les jambes croisées. Il y en avait tellement ! Puis je m'avançais très très lentement vers elle, cachant le lieu du crime avec "le Monde" grand ouvert. Des habitués des trains qui me voyaient chaque jour avaient dû s'apercevoir de mes manèges. Mais je m'en foutais, la force du vice me guidait inexorablement.
Ce vice s'éteignit avec le temps, lorsque mes premières vraies amourettes débutèrent. Mais j'en ai gardé le goût des femmes mûres. Je n'ai jamais, même plus tard, été attiré par les petites jeunes qui me paraissaient bien fades.
Qu'est-elle devenue, cette belle inconnue qui me lança dans le désir ?